3 questions sur la société à mission

3 questions sur la société à mission

Promulguée le 22 mai 2019, la loi Pacte fête son 5ème anniversaire. Ce Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises a fait entrer définitivement dans le droit français les notions d’”intérêt social”, de “raison d’être” et de “société à mission”.

Dans cet article, Arnaud Bergero, Directeur Général de Goodwill-management répond à 3 questions en lien avec la qualité de société à mission.

Les auditeurs ont un rôle clé à jouer pour renforcer, crédibiliser et accompagner la montée en puissance des sociétés à mission.

1. A l’approche de la date anniversaire du statut de société à mission : où en est-on ?

La société à mission est une entreprise qui intègre le respect d’engagements sociaux et environnementaux dans ses statuts.

La qualité de société à mission fêtera, le 22 mai prochain, son 5ème anniversaire. Depuis, la barre symbolique des 1 000 sociétés à mission a été franchie. On parle aujourd’hui de 1 490 entreprises concernées par ce modèle, parmi lesquelles de nombreuses PME et quelques grands groupes. Ce chiffre est loin des 3 millions d’entreprises en activité en France. Pourtant, il ne faut pas y voir nécessairement un désamour mais plutôt l’attente d’une solidité, d’une crédibilité et de bénéfices qui restent à évaluer.

La dynamique est là. Il faut l’encourager en défendant un cadre sérieux et un audit rigoureux.

Force est de constater qu’une grande partie des sociétés à mission a moins de deux ans. Cela signifie qu’elles n’ont jamais été auditées. Quant aux pionnières, selon une étude récente de la Machine à Sens, seules 24% des sociétés à mission ont rendu public leur avis d’audit.

Ce statut doit encore faire ses preuves pour être plus largement adopté. Il lui faut démontrer sa capacité à être véritablement différenciant, sérieux et solide : des paramètres qui conditionnent son adoption et sa généralisation dans les prochaines années.

Faire un bilan à 5 ans de ce statut semble donc un peu prématuré. Laissons aux entreprises le temps de s’emparer de ce dispositif. Notons que l’avis d’audit, lorsqu’il est disponible, est positif dans plus de 3 cas sur 4.

2. Comment renforcer et protéger ce statut, selon vous ?

Société à mission un jour, ne doit pas signifier automatiquement société à mission pour toujours. Il en va de la protection et de la pérennité de ce statut. Que vaut une société à mission qui n’a pas été auditée ?

Devenir une société à mission, c’est accepter de faire vérifier sa mission par un auditeur tous les deux ou trois ans, en fonction de la taille de l’entreprise. A l’instar d’un audit comptable et financier, qui sert à évaluer la sincérité et la régularité des états financiers d’une société, il est bon de généraliser l’audit massif des sociétés à mission par des organismes tiers indépendants. Des tiers extérieurs chargés de vérifier l’exécution et l’atteinte des objectifs sociaux et environnementaux qui sont au cœur du modèle de société à mission.

Le choix de la qualité de société à mission ne saurait être un exercice de communication, un levier de marketing ou d’image. Ce statut s’adosse à un plan d’action et à des indicateurs précis. Il ne s’agit pas simplement d’un vœu pieux. Adopter ce modèle suppose un changement profond de la gouvernance et des statuts de l’entreprise. Dans ce contexte, les auditeurs sont des acteurs du renforcement de la qualité et de la montée en maturité de ce statut.

La bonne nouvelle, qui contribue au renforcement du modèle, est que le périmètre de ce qui est audité aujourd’hui ne se limite plus à la simple vérification de l’exécution et de l’atteinte des objectifs par l’entreprise. L’auditeur doit en effet désormais vérifier la cohérence de la mission, à savoir le lien entre la raison d’être, les objectifs statutaires et l’activité de l’entreprise. Il doit également s’assurer que le comité ou le référent de mission joue bien son rôle de questionnement stratégique et de suivi de l’exécution de la mission.

Dans un contexte où il n’existe pas de police de la société à mission, un audit systématique et plus exigeant vient renforcer l’identité, la singularité et le sérieux des entreprises qui font le choix de ce statut ; leur donnant ainsi un avantage comparatif et concurrentiel.

3. Qu’espérer pour l’avenir et la pérennité de ce statut ?

“Société à mission” en France ; “Società benefit” en Italie ; “Sociedad de Beneficio e Interés Colectivo (BIC)”, en Espagne : il y a une histoire à écrire au niveau européen, en défendant l’harmonisation du statut de société à mission.

Le cadre européen viendrait conforter et crédibiliser l’engagement des entreprises qui font de la prise en compte des défis sociaux et environnementaux une priorité.

L’horizon européen plaide également pour le maintien et l’harmonisation des pratiques d’audit. Ainsi, l’augmentation du périmètre d’intervention de l’auditeur participe de ce même mouvement vers une plus grande maturité de la société à mission. Véritable outil stratégique, ce nouveau modèle d’entreprise qui se donne pour objectif de contribuer positivement à la société ou à l’environnement, contribue aux transitions qui sont devant nous. Il faut s’en féliciter.

CSRD : Décryptage des ESRS, les standards européens de l’information de durabilité

CSRD : Décryptage des ESRS, les standards européens de l’information de durabilité

Le 31 juillet 2023, la Commission européenne (CE) a publié le règlement délégué relatif au premier jeu de normes européennes d’information en matière de durabilité. On parle des ESRS pour European Sustainability Reporting Standards.

Socle de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), ces normes définissent un langage commun pour permettre aux entreprises européennes de communiquer sur les sujets de durabilité.

Qu’est-ce que les ESRS ? Comment ont-elles été définies ? Comment sont-elles construites ? Qui est concerné ? A partir de quelle date les entreprises devront s’y conformer ?

C’est quoi les ESRS ?

Les ESRS sont les normes européennes d’information en matière de durabilité.

Difficile de vous parler des ESRS sans revenir sur la CSRD. Entrée en vigueur en janvier 2023, la CSRD impose aux entreprises la rédaction d’un rapport de durabilité détaillant toutes les politiques liées à l’environnement, au social et à la gouvernance de l’entreprise. La CSRD est une directive, que l’ensemble des pays membres doivent transposer dans leurs droits nationaux d’ici fin 2023. Elle définit les seuils, le calendrier et les grands axes du rapport de durabilité (modèle d’affaires, risques, opportunités) ainsi que le contenu thématique sur les piliers ESG.

D’après le règlement délégué publié par la Commission européenne en juillet 2023 :

« les ESRS spécifient les informations qu’une entreprise publie sur ses incidences, risques et opportunités importants en ce qui concerne les questions de durabilité dans les domaines environnemental, social et de la gouvernance»

La CSRD s’appuie sur les ESRS, un règlement plus opérationnel qui définit le contenu et le format de l’information à publier dans le rapport de durabilité. Les ESRS précisent également les méthodologies à appliquer (double matérialité, chaîne de valeur…).

La CSRD et les ESRS visent le même objectif : fournir une information de durabilité de qualité, fiable, pertinente et comparable entre tous les acteurs économiques. Avec la CSRD et les ESRS, l’Union européenne a pour ambition de mettre sur le même plan l’information de durabilité et l’information financière.

Les ESRS s’appliqueront au sein de l’Union européenne à toutes les entreprises qui seront soumises à la publication d’un rapport de durabilité selon la CSRD.

Des normes ESRS qui s’appuient sur les 3 thématiques ESG (Environnement, Social et Gouvernance)

Avec la CSRD et les ESRS, les entreprises devront publier des informations de durabilité sur l’ensemble des sujets environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), en appliquant une analyse de double matérialité. Allant au-delà de la matérialité financière promue par l’ISSB, l’analyse de double matérialité prend en compte à la fois la façon dont les différentes questions de durabilité affectent l’entreprise au plan financier ET les impacts des activités de l’entreprise sur les personnes et l’environnement.

Ce premier jeu de normes définit le socle commun normalisé sur lequel l’ensemble des entreprises doivent communiquer des informations de durabilité. D’autres jeux de normes viendront le compléter en 2024 et 2025, notamment les normes sectorielles et également celles à destination des PME côtées et des entreprises non européennes.

Concrètement, ce jeu publié en juillet 2023 comprend 12 projets de normes, dont deux normes transversales et dix normes thématiques, dont cinq sur les questions environnementales, quatre sur les questions sociales et une sur la gouvernance.

Schéma normes ESRS - Goodwill-management

Deux normes transverses

Les deux normes transverses détaillent les principes à respecter par les entreprises pour fournir une transparence globale sur leur mode de fonctionnement à leurs parties prenantes.

  1. La norme ESRS 1 détaille les principes généraux pour la publication du rapport. Il décrit l’architecture, les principes et les concepts généraux des normes ESRS
  2. La norme ESRS 2 définit les renseignements à communiquer obligatoirement par l’entreprise sur tous les sujets de durabilité. Cette norme détaille comment l’entreprise prépare sa déclaration de durabilité ; quels sont les processus, contrôles et procédures à mettre en place en matière de gouvernance ; quels éléments de la stratégie se rattachent à des questions de durabilité ou influencent le modèle économique et la chaîne de valeur de l’entreprise ; comment les intérêts et les avis des parties intéressées sont pris en compte dans la stratégie et le modèle économique ; quelle est la procédure d’identification des incidences, risques et opportunités ; quelles politiques et actions l’entreprise met en place sur les questions de durabilité ? Quels sont les performances de l’entreprise, les cibles fixées et progrès accomplis ?

Cinq normes environnementales

Pour la thématique Environnement, il existe 5 normes ESRS :

  1. La norme E1 sur le changement climatique est alignée sur TCFD (Task Force on Climate-related Financial Disclosures). Elle permet de comprendre les efforts d’atténuation passés, actuels et futurs et l’impact du changement climatique sur l’activité.
  2. La norme E2 sur la pollution détaille les polluants rejetés par l’entreprise et les postes les plus émetteurs.
  3. La norme E3 sur les ressources hydriques et marines s’intéresse à la consommation d’eau de l’entreprise et à la pollution des zones d’eau qu’elle génère.
  4. La norme E4 sur la biodiversité et les écosystèmes permet de décrire l’impact de l’entreprise sur son environnement et la biodiversité.
  5. La norme E5 sur l’utilisation des ressources et l’économie circulaire détaille le type de ressources utilisées et la manière dont elle s’inscrit dans une démarche d’économie circulaire.

Quatre normes sociales

Une entreprise joue un rôle – pouvant être positif comme négatif – dans l’économie locale, l’emploi et la population. Avec la CSRS, l’entreprise devra communiquer sur les points suivants :

  1. La norme S1 sur les effectifs de l’entreprise permet de décrire et d’évaluer la qualité des conditions de travail au sein de l’entité (rémunération, diversité, formation, etc.) ;
  2. La norme S2 sur les employés de la chaîne de valeur permet de décrire les politiques encadrant les employés de ses parties prenantes et ses fournisseurs, les processus de travail et les objectifs de réduction des impacts ;
  3. La norme S3 sur les communautés affectées permet de savoir si l’impact de l’entreprise est positif ou négatif ;
  4. La norme S4 sur les consommateurs et les utilisateurs permet de partager des informations concernant les utilisateurs finaux de ses produits ou services – l’acquisition de la marchandise et son utilisation.

Une norme sur la gouvernance

La norme ESRS G1 évoque les thèmes suivants : la culture d’entreprise et les politiques de conduite des affaires, la gestion des relations avec les fournisseurs et la prévention et détection de la corruption.

Comment sont structurées les normes ESRS ?

La CSRD élargit considérablement les sujets couverts par le reporting de durabilité et les normes ESRS permettent d’approfondir encore plus l’exhaustivité des informations à publier selon chaque thèmatique ESG. Elle se structure de la manière suivante en sujet, sous-sujet, sous-sous-sujet, exigence de divulgation (DR) et enfin l’information, aussi appelée datapoints.

Structure des ESRS - CSRD - Goodwill-management

L’information de durabilité, ou datapoints pourra prendre deux formes :

  • Qualitative : par exemple expliquer de quelle manière les risques climatiques ont (ou auront) une influence significative sur la situation financière de l’entreprise, ses résultats financiers et ses perspectives d’avenir.
  • Quantitative : par exemple communiquer sur les montants monétaires et le pourcentage des actifs exposés à un risque physique important à court, moyen et long terme, avant l’adoption de mesures d’adaptation au changement climatique.

Comment ces normes ont-elles été définies ?

La Commission européenne (CE) a mandaté l’EFRAG pour rédiger les projets de normes encadrant la CSRD.

L’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) a pour rôle de développer et de promouvoir la voix européenne dans l’élaboration des normes comptables internationales (IFRS).

L’EFRAG s’est appuyé sur les recommandations de la TCFD (Task Force on Climate-related Financial Disclosures) pour la structure des ESRS et s’est assurée que les normes soient conformes aux autres législations européennes.

Le 29 avril 2022, l’EFRAG a lancé une consultation publique de plusieurs mois sur une première version des normes, nommées exposés-sondages. Pour revoir sa copie, l’EFRAG a pris en compte les commentaires de plus de 700 parties prenantes et également les changements apportées entre temps au projet de directive CSRD.

En novembre 2022, l’EFRAG a ainsi remis à la CE 12 projets de normes non sectorielles.

Malgré des ajustements que nous détaillons dans le paragraphe suivant, la CE a globalement repris le contenu proposé de l’EFRAG, comprenant 12 normes couvrant le spectre complet des sujets ESG (Environnement, Social et Gouvernance).

Quelles sont les principales évolutions des ESRS ?

Pour répondre aux inquiétudes quant aux difficultés pour les entreprises de mettre en œuvre de la CSRD, la Commission européenne a apporté des ajustements aux normes ESRS proposées par l’EFRAG. Ces ajustements introduisent une mise en application plus progressive des normes, afin de laisser plus de temps aux entreprises, surtout les plus petites, pour se mettre en conformité.

  1. L’analyse de double matérialité devient centrale et concerne toutes les normes ESRS, à l’exception de l’ESRS 2 (sur les informations générales). Concrètement, l’analyse de matérialité déterminera sur quels indicateurs ESG l’entreprise devra communiquer. Par exemple, le rapport de durabilité prendra en compte le changement climatique si l’entreprise considère qu’elle a un impact sur le changement climatique et à l’inverse que ce dernier a un impact sur sa performance financière.
  2. En donnant plus de poids à l’analyse de matérialité, la Commission a réduit le nombre d’informations obligatoires. L’analyse de matérialité déterminera si un enjeu est matériel ou non pour l’entreprise. Si l’entreprise considère qu’un sujet n’est pas matériel, elle n’aura pas communiquer d’informations sur ce dernier.
  3. La CE a également renforcé les dispositions transitoires (phase-in), listées dans ESRS 1 (sur les principes généraux). Ces dispositions transitoires rendent plus progressive la mise en œuvre de la CSRD pour les entreprises ou groupes n’excédant pas 750 salariés. Ces entreprises pourront notamment omettre la première année toutes les informations listées par ESRS S1 (sur les effectifs) la première année et toutes les informations listées par ESRS E4 (sur la biodiversité) et ESRS S2 à S4 (sur les travailleurs au sein de la chaîne de valeur, les communautés affectées et les consommateurs et utilisateurs) les deux premières années.
  4. La CE a également ajouté des modifications ciblées (mesures de sauvegarde et flexibilité), principalement pour garantir la proportionnalité des exigences en termes d’informations à fournir. Par exemple pour ESRS E1 (sur le changement climatique), les entreprises de moins de 750 salariés peuvent la première année omettre toutes les données sur les émissions du scope 3 et les émissions totales de GES.
  5. Ces ajustements renforcent également la cohérence avec le cadre légal européen.
  6. Ils insistent enfin sur l’interopérabilité avec les autres normes d’information en matière de durabilité qui sont reconnues au niveau mondial, notamment la GRI et celles de l’ISSB.

Les ESRS sont-elles harmonisées avec les normes de la GRI et les standards de l’ISSB ?

Tout a fait, afin d’éviter aux entreprises un double voir un triple effort de reporting ESG, l’Union européenne a travaillé sur l’harmonisation des normes ESRS avec celles de la GRI (Global Reporting Initiative) et les standards de l’ISSB (International Sustainability Standards Board) pour atteindre un «degré d’interopérabilité très élevé». Concrètement, si votre reporting de durabilité est conforme aux critères ESRS, vous répondez également aux critères internationaux de l’ISSB.

L’EFRAG a d’ailleurs publié une table de correspondance (PDF) entre les ESRS et le standard international de l’ISSB.

Il est cependant important de noter la différence d’approche sur le sujet de la matérialité. Alors que les normes ESRS et le GRI intègrent la double matérialité, l’ISSB privilégie l’approche de la matérialité simple, aussi appelée financière.

À quelle date les entreprises devront-elles se conformer aux normes ESRS ?

Voici le calendrier d’application de la CSRD et des ESRS :

  • Dès 2025 (sur données 2024) : Les entreprises déjà concernées par la NFRD (Entités d’intérêt public de + de 500 salariés en moyenne, 25 M€ de total bilan ou 50 M€ de chiffre d’affaires
  • Dès 2026 (sur données 2025) : Les entreprises qui dépassent 2 des 3 seuils suivants : +250 collaborateurs en moyenne, 50 M€ CA ou 25 M€ de bilan
  • Dès 2027 (sur données 2026) : Les PME cotées sur un marché règlementé de l’UE (10 à 250 salariés), avec une possibilité de différer leur obligation de reporting pendant 3 ans avec un standard allégé.
  • Dès 2029 (sur données 2028) : Les entreprises non-UE qui génèrent un CA > 150 M€ dans l’UE pendant les deux dernières années consécutives et qui ont au moins une succursale ou filiale dans l’UE qui génère un chiffre d’affaires > 40M€ l’année précédente

En conclusion : un conseil, n’attendez pas pour vous préparer

Avec la publication des normes ESRS et des datapoints, les entreprises ont toutes les clés en main pour se préparer dès à présent aux exigences de la CSRD.

Malgré les allégements introduits par la Commission européenne, la mise en oeuvre de la CSRD et des ESRS reste un réel défi pour les entreprises. Il s’agit en effet d’un exercice de transparence bien plus complet et exigeant que celui de la NFRD. De plus, l’information de durabilité devra être auditée, avec une assurance modérée dans un premier temps, qui devrait tendre à terme vers une assurance raisonnable.

Au delà de l’aspect purement réglementaire, la CSRD représente bel et bien une opportunité pour approfondir l’intégration des enjeux de durabilité au coeur de la stratégie de l’entreprise et contribuer à améliorer sa performance globale. 

Pour aller plus loin, découvrez l’épisode du podcast Know dédié à la CSRD avec Delphine Leduc, Directrice du Pôle reglementaire et Audit RSE de Baker Tilly :

Pourquoi et comment promouvoir le sport en entreprise ?

Pourquoi et comment promouvoir le sport en entreprise ?

A l’aube des Jeux olympiques et paralympiques, le Gouvernement et le MEDEF souhaitent mobiliser les entreprises et les administrations publiques pour faire de la France une nation sportive.

Dès 2015, le MEDEF, en partenariat avec le CNOSF et AG2R La Mondiale, se mobilisait déjà sur le sujet du sport en entreprise en mandatant Goodwill-management pour en évaluer l’impact. Nos experts avaient alors construit 3 modèles de calcul pour mesurer l’impact économique d’une activité physique et sportive :

3 modèles pour évaluer l'impact du sport en entreprise- Goodwill-management

Meilleure santé, allongement de l’espérance de vie, amélioration de la productivité, moins d’absentéisme… découvrez les résultats de l’étude conduite en 2023 par Goodwill-management sur l’impact du sport en entreprise. 

En 2023, une nouvelle étude confirme que la pratique d’une activité physique et sportive en milieu professionnel crée de la valeur

En 2023, le Medef a souhaité mettre à jour l’étude réalisée par Goodwill-management en 2015 sur la performance économique du sport en entreprise. Les modèles ont donc été affinés et les données actualisées. Comme en 2015, cette étude confirme que l’activité physique et sportive est bonne pour le salarié, l’entreprise et la société. ​

Zoom sur les grands principes méthodologiques de l’étude

Comme évoqué précédemment, pour mesurer l’impact économique de la pratique d’une activité physique et sportive dans le milieu professionnel, Goodwill-management a développé 3 modèles de calcul :

  1. Le modèle “Salarié” qui évalue les économies réalisées sur le budget santé du salarié
  2. Le modèle “Société Civile” qui évalue les économies réalisées sur les frais de santé par la sécurité sociale
  3. Le modèle “Entreprise” qui évalue le gain de productivité des salariés.

Ces 3 modèles s’appuient sur 2 piliers :

  1. L’engagement des salariés : Quelle est l’intensité de la pratique sportive du salarié
  2. L’engagement de l’entreprise : Quel est le niveau d’engagement de l’entreprise afin de pousser ses salariés à se mettre au sport

L’intensité de la pratique sportive est exprimée en équivalent métabolique (MET), unité mesurant la dépense énergétique associée à une activité.​

L’échelle utilisée dans l’étude est la suivante : MET multiplié par le nombre d’heures de pratique par semaine

Dans l’étude, une activité modérée correspond à 7,5 MET/h/semaine (une heure de jogging léger par semaine), une activité intense à 15 MET/h/semaine (deux heures de natation par semaine) et une activité très intense à 30 MET/h/semaine (3h de football intense par semaine).

Côté entreprise, 4 niveaux d’engagement ont été définis, le niveau 1 se limitant à de la sensibilisation et l’installation d’un parking à vélo et le niveau 4 à l’intégration d’une salle de sport et d’un coach dans l’entreprise. 

Les principaux résultats

Pour le salarié, faire du sport permet d’économiser 53€ sur son budget santé pour une activité modérée et 79€ pour une activité très intense. Ce qui représente entre 23 et 33 % du budget santé restant à sa charge. Un collaborateur pratiquant une activité physique ou sportive est en meilleure santé, ce qui se traduit par une diminution des dépenses de santé et des arrêts de travail.

Par extension, un salarié qui se met au sport fait économiser entre 185 et 353€ à la société civile, ce qui représente entre 7 et 13 % du budget santé à la charge de la sécurité sociale.

Pour l’entreprise, le bilan économique est également très positif puisque la pratique  d’une activité physique et sportive permet d’augmenter la productivité du salarié entre 4,5 et 7,9 %. 4,5 % correspond à un salarié qui pratique une activité physique modérée dans une entreprise qui commence à investir sur le sujet et 7,9 % à une collaborateur qui pratique une activité très intense dans une entreprise qui s’engage très fortement sur le sujet.

Quelles actions l’entreprise peut-elle mettre en place pour favoriser le sport en entreprise ?

Favoriser les mobilités actives 

Selon l’ADEME, les déplacements actifs représentent la plus grande part de l’activité physique globale des salariés en lien avec leur travail (environ 35 %), bien devant la pratique du sport (seulement 6 %).

La mobilité reste donc l’un des principaux leviers pour mettre en mouvement les salariés. En favorisant la mobilité active, par exemple la marche ou le vélo, l’entreprise incite à la pratique d’une activité physique. Pour faciliter les changements de comportement, l’entreprise peut par exemple investir pour créer un environnement favorable aux cyclistes (création de stationnement vélo, installation de douches, atelier de réparation…) ou encore mettre en place un forfait mobilité durable.

Organiser un challenge inter-entreprises

Parmis les nombreux challenges inter-entreprises, le MEDEF lance, en partenariat avec la Fédération Française du Sport d’Entreprise-FFSE et SPART, un challenge sportif : “Faites vos jeux en entreprise“.

Disponible en version numérique via une application dédiée et en version physique à travers différentes compétitions, les participants relèveront des défis sportifs, ludiques et accessibles à tous, en amont des JO 2024.

Mettre à disposition une salle de sport ou financer des séances de sport à ses salariés

Financer des cours collectifs, compétitions ou événements sportifs*, installer une salle de sport au sein de l’entreprise ou un espace géré par elle ou dont elle prend en charge la location…

Bonne nouvelle, depuis le 31 mai 2021, le législateur encourage la pratique du sport en entreprise en supprimant les cotisations sur la mise à disposition par l’employeur d’équipement sportifs à usage collectif et le financement de prestations sportives à destination de l’ensemble de ses salariés.

*dans une limite annuelle égale à 5 % de la valeur mensuelle du plafond de la Sécurité sociale multipliée par l’effectif de l’entreprise.

Financer une partie de l’abonnement de ses collaborateurs

Les CSE peuvent également choisir de souscrire un abonnement à un prestataire, tel que Gymlib par exemple, pour proposer aux collaborateurs un accès à de nombreuses activités sportives et salles de sport partout en France. L’entreprise co-finance alors l’abonnement de ses salariés.

Evaluez l’impact économique de vos actions  en faveur du sport

Téléchargez l’outil développé par Goodwill-management à destination du MEDEF pour évaluer l’impact économique des actions menées par votre entreprise en faveur de la pratique d’une activité physique ou sportive.

Picto outil - goodwill

Décryptage : CSRD, la nouvelle obligation de reporting des entreprises

Décryptage : CSRD, la nouvelle obligation de reporting des entreprises

La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), qui entre en vigueur dès janvier 2024, fait partie du plan d’action pour la finance durable de l’Union Européenne.

Cette directive encadre le reporting de durabilité et impose aux entreprises concernées de rédiger un rapport de durabilité expliquant les politiques liées à l’environnement, au social et à la gouvernance (ESG) mises en place par l’entreprise et celles prévues. Cette directive renforce les exigences de la Non-Financial Reporting Directive (NFRD) en matière de reporting de durabilité, qui impose aujourd’hui la rédaction de la Déclaration de performance extra-financière (DPEF).

L’objectif de la CSRD est la diffusion d’une information de durabilité fiable, pertinente et comparable entre tous les acteurs économiques.

Pourquoi ce passage de la DPEF au rapport de durabilité ? Qui est concerné par la CSRD ? Quelles sont les informations précises que ce nouveau rapport demande ? Quelles sont les modalités de publication ? Voici des réponses aux principales questions sur la CSRD.

Pourquoi remplacer la DPEF par le rapport de durabilité ?

La DPEF, entrée en vigueur en 2018, est la déclaration des entreprises françaises sur leurs politiques sociales, environnementales et de gouvernance, encadrée par la NFRD.

La rédaction de la DPEF a permis de généraliser la publication d’informations sur les sujets liés au développement durable au sein de l’Union Européenne. Cependant sa transposition par les États membres est assez libre. Le cadre de reporting et le format de publication ne sont par exemple pas imposés. Les données ne sont pas suffisamment contrôlées dans la plupart des pays de l’Union Européenne, à l’exception de la France.

Avec l’instauration du rapport de durabilité, imposé par la CSRD, l’exercice est plus cadré. Ce rapport vise à accroître la transparence, la comparabilité entre les entreprises de tous les pays et la fiabilité des informations.

Quelles entreprises sont concernées par la CSRD ?

La CSRD concerne progressivement toutes les grandes, moyennes et petites entreprises de l’Union Européenne. Elle concerne :

  • En 2024, toutes les EIP (entreprises d’intérêt public)* actuellement soumises à la NFRD, c’est-à-dire qui remplissent au moins 2 des 3 critères suivants : plus de 500 salariés, plus de 25 M€ de bilan, plus de 50 M€ de chiffre d’affaires ;
  • En 2025, toutes les entreprises qui remplissent au moins 2 des 3 critères suivants : plus de 250 salariés, plus de 25 M€ de bilan, plus de 50 M€ de CA ;
  • En 2026, toutes les PMEs cotées (sauf les microentreprises) et les établissements de crédit de petite taille et non complexes (possibilité de différer le reporting pendant 3 ans)
  • En 2028, les entreprises non européennes réalisant un chiffre d’affaires de plus de 150 M€ en Union Européenne et qui ont au moins une filiale ou succursale dans l’UE, générant plus de 40 M€ de Chiffre d’affaire sur l’année n-1.

En d’autres termes, la CSRD concerne de très nombreuses entreprises : 50 000 contre 12 000 pour la NFRD

*Sociétés dont les titres sont soumis à un marché réglementé (secteur bancaire et assurances)

Quelles sont les informations à publier dans le rapport de durabilité ?

L‘EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) a été mandaté par la Commission Européenne pour définir le cadre du reporting via 12 ESRS (European Sustainability Reporting Standards), répartis selon  3 sujets « ESG » : Environnement, Social, Gouvernance. Voici les diverses thématiques traitées :

Tableau des thématiques ESG de la CSRD - Goodwill-management

Les entreprises doivent fournir des informations quantitatives sur ces sujets, plus d’une centaine d’indicateurs précis sont à divulguer (par exemple les émissions de GES scope 1, 2 et 3 en TeqC02, les intensités carbones en chiffre d’affaires net, le nombre d’employés permanents et temporaires…) ainsi que des informations qualitatives pour expliquer les politiques mises en place ou prévues.

Par ailleurs, les entreprises doivent publier des informations à la fois sur les incidences des activités sur la population et l’environnement et sur la manière dont les questions de durabilité influent sur l’entreprise. C’est le principe de « double importance relative » ou « double matérialité ».

Quelles sont les modalités de publication et de contrôle ?

Le rapport de durabilité doit être publié dans une section dédiée du rapport de gestion, sous une forme numérique standardisée au niveau européen, ce qui simplifie l’évaluation des informations.

Par ailleurs, le rapport de durabilité doit être contrôlé, au choix de l’État membre par un commissaire aux comptes ou par un non-commissaire aux comptes indépendant.

Des pénalités aux choix des états membres sont à attendre en cas de non-respect de ces obligations.

Notre conseil, préparez-vous dès maintenant à la mise en œuvre de la CSRD

L’entrée en vigueur de la CSRD représente un grand changement pour toutes les entreprises, notamment pour celles qui n’étaient jusqu’à présent pas visées par la NFRD. Il faut s’y intéresser dès maintenant !

De plus, les entreprises de moins de 250 salariés qui ne sont pas directement concernées par la rédaction du rapport de durabilité le sont implicitement, les grandes entreprises qui les sous-traitent doivent prouver qu’elles travaillent avec des fournisseurs durables et conscients des urgences environnementales, sociales et de gouvernance… Toutes les entreprises européennes sont finalement concernées et impliquées.

Télécharger notre livre blanc pour tout savoir de la CSRD :

  • Objectifs & enjeux de la CSRD
  • Modalités & contenus du reporting
  • Entreprises concernées
  • Échéances à venir
  • Conseils pour bien se préparer
Image libre blanc CSRD

CSRD, SFDR, taxonomie verte, CSDDD : décryptage des nouvelles obligations européennes

CSRD, SFDR, taxonomie verte, CSDDD : décryptage des nouvelles obligations européennes

CSRD, SFDR, taxonomie verte, CSDDD… Dans cet article, nous vous proposons un décryptage de ces termes et acronymes, pas toujours simples à appréhender. Des concepts qu’il convient de maîtriser pour comprendre comment l’Union européenne souhaite enclencher sa transition vers une économie plus durable.

Quels sont les objectifs et les attendus de ces règlementations ? Qui est concerné ? Quels sont les liens entre ces différentes mesures et comment contribuent-elles à la transition durable de l’UE.

L’Union européenne met en place une série de mesures pour réussir son Green Deal

A travers l’ensemble de ces réglementations, l’Union Européenne a pour objectif de respecter l’Accord de Paris de 2015 et le Pacte Vert de 2019 ou Green Deal. Pour rappel, l’ambition de l’Accord de Paris est de rester en dessous des 1,5°C de réchauffement climatique par rapport à l’époque préindustrielle. Pour respecter cet accord, l’Union européenne a défini à travers le Pacte Vert une feuille de route pour atteindre la neutralité carbone à horizon 2050 avec un objectif intermédiaire de réduction de 55 % des émissions GES d’ici 2030.

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, la Commission européenne a besoin d’au moins 1 000 Mds € par an entre 2021 et 2027, soit 350 Md€ en plus par an par rapport à la période 2011-2020. Cependant l’Union européenne ne compte pas financer seule cette transition. C’est pourquoi elle a pris d’importantes mesures en faveur de la finance durable, afin d’orienter les financements privés vers les acteurs qui contribuent à la transition durable.

Cependant comment savoir si un investissement ou une activité contribue réellement à la transition écologique ? Il était temps d’instaurer un cadre législatif rigoureux pour identifier les fonds éthiques ou les activités économiques durables et éviter le greenwashing. C’est l’objectif du règlement sur la taxonomie verte européenne, une classification permettant d’identifier les activités économiques considérées comme durables.

A la taxonomie s’ajoute la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) qui vise à harmoniser et à fiabiliser le reporting extra-financier des entreprises, la CSDDD (Corporate Sustainability due diligence directive) sur le devoir de vigilence et le règlement SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) qui concernent les produits financiers.

Pour s’y retrouver parmi ces acronymes, voici un schéma qui récapitule l’articulation entre les différents textes :

Schéma sur l'articulation des nouvelles obligations européennes - Goodwill management

CSRD, CSDDD, SFRD, taxonomie verte, kézako ?

De la NFRD à la CSRD pour harmoniser les pratiques de reporting ESG des entreprises

La NFRD (Non Financial Reporting Directive), promulguée en 2014, impose aux grandes entreprises (+500 salariés, CA +50 M€ ou bilan +25 M€) de communiquer des informations sociales, sociétales et environnementales au sein d’un rapport intitulé la Déclaration de performance Extra-financière (DPEF). Ce texte a fortement contribué à développer le reporting extra-financier, mais comporte des limites. En effet, la DPEF n’impose aucun indicateur précis et laisse à l’entreprise le choix du format de la publication, ce qui ne permet pas de réelle comparaison des entreprises à l’échelle européenne sur les mesures environnementales et sociales qu’elles mettent en place.

Avec la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), l’Union européenne veut imposer aux entreprises concernées la rédaction d’un rapport de durabilité plus cadré, avec des indicateurs précis et des modalités de publication harmonisées. En plus de cela, la CSRD concerne un spectre plus large que celui de la NFRD, incluant les entreprises de +250 salariés et les PMEs cotées.

La publication du rapport de durabilité via la CSRD est une obligation de transparence pour les entreprises. Il s’agit de communiquer sur les mesures mises en œuvre par l’entreprise en lien avec le développement durable. La CSRD ne sanctionnera pas les entreprises les moins vertueuses.

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  • Modalités & contenus du reporting
  • Entreprises concernées
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Image libre blanc CSRD

Création de la La CSDDD instaure un devoir de vigilance européen

Début juin, le parlement européen a adopté une version ambitieuse de la CSDDD (Corporate Sustainability due diligence directive). La directive sera définitivement promulguée courant 2024 après des négociations qui s’annoncent difficiles entre la Commission Européenne, le Conseil et le Parlement européen. Cette directive devrait imposer aux grandes entreprises un devoir de vigilance. Les entreprises auraient ainsi l’obligation de modifier leurs pratiques internes pour identifier, prévenir et atténuer les risques liés aux droits de l’Homme, à l’environnement et à la santé et à la sécurité tout au long de leur chaîne de valeur. Les entreprises concernées par la CSDDD seraient les sociétés européennes soit avec +500 employés et un CA +150 M€ au cours du dernier exercice ; soit opérant dans des secteurs à haut risque, avec +250 salariés et un CA + 40 M€ au cours du dernier exercice, avec au moins la moitié de ce CA généré dans un secteur à haut risque.

Les informations répertoriées dans la CSRD et la CSDDD seront utilisées par les acteurs des marchés financiers.

La SFDR : une règlementation spécifique aux acteurs des marchés financiers

L’ensemble des acteurs des marchés financiers sont également concernés par la prise en compte de la durabilité. La SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) vise principalement à identifier ce qui est ou n’est pas un fond ou un produit durable. Elle permet aux gérants d’actifs d’intégrer les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance, à l’échelle de l’entreprise et à l’échelle des fonds et produits en toute conscience.

Le règlement SFDR classe chacun des produits des sociétés du secteur financier, que l’on peut résumer en 3 grandes catégories :

  • Les produits classés « Article 9 », qui adressent un objectif d’investissement durable avec un enjeu environnemental ou social clairement défini et annoncé à l’investisseur 
  • Les produits classés « Article 8 », qui n’adressent pas un objectif de durabilité directement mais comportent une obligation de moyens de répondre à des critères ESG
  • Les produits classés « Article 6 », qui regroupent tous les autres produits n’intégrant pas de façon contraignante les critères ESG.

La taxonomie verte, clé de voute des réglementations sur la finance durable

Enfin, un texte primordial relie les réglementations évoquées précédemment : la taxonomie verte européenne. La taxonomie verte définit très concrètement ce que l’on entend par « durable » : quelles activités économiques peuvent-être considérées comme durables et lesquelles ne peuvent pas l’être ?

Pour être qualifiée de durable selon la taxonomie verte, une activité économique doit répondre à 3 points majeurs :

  • elle doit contribuer substantiellement à l’un des 6 objectifs environnementaux : l’atténuation du changement climatique, l’adaptation, l’eau, l’économie circulaire, la pollution et la biodiversité
  • elle ne doit pas porter de préjudice à l’un des autres objectifs environnementaux
  • elle doit respecter les garanties minimales sociétales (OCDE, principes directeurs des Nations Unies, déclaration de l’OIT et charte internationale des droits de l’Homme).

La Taxonomie Européenne s’adresse à l’ensemble des acteurs des marchés financiers ainsi qu’à toutes les grandes entreprises soumises à la directive NFDR et prochainement à la directive CSRD, ce qui élargira le spectre à 50 000 entreprises concernées (12 000 aujourd’hui).

Enfin, une autre taxonomie européenne est en cours de rédaction, il s’agit de la taxonomie sociale, tournée autour des problématiques sociales.

Un tsunami réglementaire en faveur de la durabilité qui va toucher l’ensemble des acteurs économiques

Malgré la complexité de cette architecture réglementaire, il est essentiel de rappeler sa finalité : répondre à la crise climatique et sociale. Or pour atteindre les objectifs du Green Deal et verdir son économie, l’Union européenne a besoin de réglementations ambitieuses pour mobiliser l’ensemble des acteurs.

Avec des réglementations complexes et en évolution, l’enjeu principal est de faciliter leur articulation et d’harmoniser les pratiques pour pouvoir produire des données de qualité et comparables.

Pour réussir, les entreprises doivent se préparer et anticiper ces règlementations. Cependant les entreprises directement soumises ne sont pas les seules concernées ! Les plus petites doivent aussi agir et instaurer des mesures durables si elles ne veulent pas être mises de côté au sein de leur chaîne de valeur.

CSRD : tout savoir de l’analyse de double matérialité

CSRD : tout savoir de l’analyse de double matérialité

La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), adoptée en novembre 2022 par l’Union européenne, va progressivement imposer à près de 50 000 entreprises la publication d’un reporting de durabilité. L’analyse de double matérialité est au cœur de ce nouvel exercice de reporting ESG et représente un réel défi pour les entreprises.

D’où vient le concept de matérialité ? Qu’est-ce que la double matérialité ? Quelles entreprises y seront soumises ? Quels sont les principes de l’analyse en double matérialité ? Comment la réaliser ?

D’où vient le concept de matérialité ?

La matérialité, un concept financier, adopté par l’univers de la RSE

Issu du système financier, le concept de « matérialité » permet de faire le tri et d’identifier les informations comptables susceptibles d’avoir un impact sur la performance financière d’une entreprise. Concrètement une information est dite matérielle lorsqu’elle dépasse un « seuil de signification », un montant au-delà duquel les décisions économiques, notamment celles des investisseurs, sont susceptibles d’être influencées.

Le milieu de la RSE et du reporting extra-financier s’est ensuite approprié le concept, notamment dès 2006 avec la Global Reporting Initiative (GRI).

Lors de la définition d’une stratégie RSE, la matérialité permet de hiérarchiser les enjeux RSE d’une entreprise pour identifier les plus prioritaires. Chaque enjeu est ainsi classé en fonction de sa pertinence ou de son importance pour l’entreprise. Chaque organisation a donc sa propre matrice de matérialité RSE, en fonction de son secteur d’activité, de sa taille et de son modèle d’affaires. En RSE, il est conseillé de consulter ses parties prenantes pour réaliser sa matrice de matérialité.

schéma de matérialité simple - CSRD - Goodwill Management

Pourquoi ce n’est pas suffisant ?

Y compris dans l’univers de la RSE, c’est la matérialité dite financière ou simple qui s’applique généralement. On s’intéresse exclusivement à l’impact d’un sujet ESG sur la performance de l’entreprise. Cependant lorsqu’il s’agit de sujets sociaux et environnementaux, cette vision de la matérialité pose problème.   

En effet, certaines informations importantes d’un point de vue social ou environnemental ne seront pas considérées comme matérielles. Par exemple, la matérialité financière pourra considérer qu’une augmentation des émissions de gaz à effet de serre n’impactera probablement pas les comptes financiers d’un grand groupe de manière significative. Pourtant on ne peut pas ignorer que les activités de ce groupe ont un impact significatif sur l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Qu’est-ce que la double matérialité ?

Définition de la double matérialité

La double matérialité, aussi appelé « double importance relative », conserve le même objectif que la matérialité simple : identifier les enjeux qui sont significatifs et qui peuvent influencer les décisions des acteurs financiers.

Cependant l’analyse de double matérialité consolide deux types de matérialité :

  • La matérialité financière (vision “Outside-in”) – ou matérialité simple évoquée dans le paragraphe précédent – qui étudie l’impact des enjeux sociétaux et environnementaux sur la performance économique de l’entreprise
  • La matérialité d’impact (vision “Inside-Out”), qui va s’intéresser à l’impact des activités de l’entreprise sur l’environnement et la société.
schéma double matérialité - Goodwill Management

Exemple d’une entreprise ferroviaire comme la SNCF 

A travers son activité de transport de personnes et de marchandises, la SNCF a un impact économique, social et environnemental sur le territoire.

En parallèle, le changement climatique risque de mettre à mal les infrastructures et le réseau (canicules, fortes précipitations, tempêtes…), mais il peut également présenter une opportunité économique car le train est aujourd’hui une solution de mobilité moins carbonée.

La double matérialité, un concept soutenu par l’Union européenne

Alors que la définition des standards de reporting extra-financier se joue actuellement sur la scène internationale, l’approche américaine, définie par l’ISSB (International Sustainability Standards Board), s’oppose aujourd’hui à celle de l’Union européenne, portée par l’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group).

En effet, l’UE promeut le concept de double matérialité, notamment à travers la CSRD, quand l’ISSB promeut une matérialité uniquement financière.

L’analyse de double matérialité, un prérequis de la CSRD

La double matérialité est un élément central des normes européennes de reporting sur le développement durable (ESRS).

Pour rappel, la CSRD a pour objectif de renforcer la transparence et la comparabilité des entreprises en matière de reporting ESG. Le but est de mettre sur un même niveau d’importance l’information financière et l’information de durabilité.

La CSRD fait de la double matérialité un outil central pour identifier les enjeux qui sont matériels et donc qui doivent être intégrés dans le rapport de durabilité. Par exemple, les émissions de gaz à effet de serre, la gestion de l’eau, les droits de l’Homme, la diversité, l’éthique des affaires…

La proposition publiée par la Commission européenne le 9 juin 2023 renforce un peu plus le rôle de la double matérialité.

Webinaire – Double matérialité

Durant une heure, Charlotte Haguenauer, Cheffe de projets chez Goodwill-management répond à vos questions :

✅ Qu’est-ce que la double matérialité ?
✅ Pourquoi est-elle au coeur dans la CSRD ?
✅ Quelles sont les étapes pour réaliser son analyse ?
✅ Comment impliquer efficacement ses parties prenantes ?

Picto webinaire

Les dernières actualités sur l’analyse de double matérialité 

Suite à la proposition de normes publiée le 9 juin 2023 par la Commission européenne, voici les dernières actualités relatives au sujet :

  • Tous les ESRS (à l’exception de l’ESRS 2 qui est obligatoire pour toutes les entreprises) sont sujets à l’analyse de double matérialité ;
  • La justification de la non-matérialité d’un enjeu, autrefois obligatoire, devient facultative.

Quelles entreprises seront soumises à l’analyse de double matérialité ?

  • Dès 2025 (sur données 2024) : Les entreprises déjà concernées par la NFRD (Entités d’intérêt public de + de 500 salariés en moyenne, 20 M€ de total bilan ou 40 M€ de chiffre d’affaires
  • Dès 2026 (sur données 2025) : Les entreprises qui dépassent 2 des 3 seuils suivants : +250 collaborateurs en moyenne, 40 M€ CA ou 20 M€ de bilan
  • Dès 2027 (sur données 2026) : Les PME cotées sur un marché règlementé de l’UE (10 à 250 salariés), avec une possibilité de différer leur obligation de reporting pendant 3 ans avec un standard allégé.
  • Dès 2029 (sur données 2028) : Les entreprises non-UE qui génèrent un CA > 150 M€ dans l’UE pendant les deux dernières années consécutives et qui ont au moins une succursale ou filiale dans l’UE qui génère un chiffre d’affaires > 40M€ l’année précédente

Quels sont les principes de l’analyse de double matérialité ?

Contrairement à l’analyse de matérialité classique, la CSRD définit un cadre plus strict dans la réalisation d’une analyse de double matérialité, que nous résumerons en 6 principes :

#1 Une méthodologie et une liste d’enjeux prédéfinis

Avant la publication de la CSRD, il n’existait pas de cadre réglementaire spécifique pour définir la matérialité et guider sa prise en compte dans les rapports extra-financiers des entreprises. Les entreprises avaient une certaine liberté dans le choix des informations à divulguer et des méthodologies à utiliser, ce qui rendait difficile la comparaison des performances entre les entreprises.

La CSRD a instauré un cadre réglementaire commun, clair et contraignant qui impose notamment la méthodologie pour évaluer le degré de matérialité d’un enjeu.

Les enjeux soumis à l’évaluation de double matérialité sont également précisés par les normes encadrant la CSRD. Dans le cadre de cette analyse, toutes les entreprises devront donc se questionner sur la matérialité d’un socle commun d’enjeux. Ce qui facilitera la comparaison entre les entreprises.

Schéma ESRS - juin 2023 - Goodwill Management

#2 Une vision qui dépasse celle de la matérialité simple

Comme vu précédemment, la matérialité financière prône l’impact des enjeux environnementaux et sociétaux sur le modèle d’affaires de l’entreprise. La double matérialité, quant à elle, dépasse cette vision en envisageant un impact à double sens, c’est-à-dire en ajoutant l’impact des activités de l’entreprise sur les enjeux environnementaux et sociétaux.

Concrètement, cette analyse incite les entreprises à mesurer et à communiquer de manière plus large leurs impacts environnementaux, positifs comme négatifs.

#3 La consultation des parties prenantes est recommandée

Les entreprises déjà concernées par la NFRD et qui réalisent leur exercice de matérialité, associent déjà pour la majorité leur parties prenantes. Cela prend souvent la forme d’une consultation (questionnaire, ateliers collectifs, entretiens individuels…). Dans les futurs rapports de durabilité, la consultation des parties prenantes devient facultative. La CSRD recommande tout de même d’associer des experts et de consulter les parties prenantes concernées ou leurs représentants dans cette démarche d’évaluation de la matérialité.

#4 Une mise en forme libre

La forme que prend l’analyse de double matérialité n’est pas imposée. L’entreprise est libre de choisir la mise en forme qu’elle souhaite pour représenter son analyse.

Il est possible par exemple de la présenter sous la forme d’une matrice ayant pour abscisse la matérialité financière et en ordonnée la matérialité d’impact.

Contrairement à la matrice de matérialité classique, l’axe des ordonnés change, en mettant en avant la matérialité à impact au lieu de l’importance pour les parties prenantes.

#5 Une matérialité élargie

La matérialité classique considère qu’un enjeu est matériel lorsqu’il est important à la fois pour les parties prenantes et pour l’entreprise. L’analyse de double matérialité considère qu’un enjeu est dit matériel s’il a un fort impact sur les sujets sociaux et environnementaux, ou sur la performance économique de l’entreprise ou sur les deux.

Exemples de matrices simple versus double - CSRD - Goodwill Management

Comment se préparer à l’analyse de double matérialité ?

Etapte 1 : Identifier les enjeux à analyser 

La liste des enjeux soumis à l’analyse de double matérialité sont disponibles dans les ESRS. Chaque enjeu se décline en sous-enjeux et sous-sous-enjeux. L’entreprise devra donc analyser la double matérialité de chacun des enjeux. L’EFRAG publiera dans les prochains mois les consignes et les lignes directrices quant à la réalisation de l’analyse en double matérialité. Ce guide devrait définir le degré de précision des enjeux (enjeux, sous-enjeux ou sous-sous-enjeux), sachant que plus l’échelle est fine, plus l’analyse est exploitable.

A noter aussi que toutes les entreprises soumises à la CSRD devront obligatoirement communiquer sur les enjeux de l’ESRS 2. Il n’est pas donc pas nécessaire de les analyser sous l’angle de la double matérialité.

Etape 2 : Consulter ses parties prenantes 

Bien que la consultation des parties prenantes ne soit pas imposée par la CSRD, elle est fortement recommandée dans le cadre de la matrice de double matérialité.

Elle permet en effet d’affiner l’analyse des enjeux les plus matériels pour votre entreprise.

Impliquer les parties prenantes vous permet aussi :

  • D’anticiper les controverses et d’identifier des opportunités
  • De bénéficier d’une perspective plus large des enjeux ESG de votre entreprise
  • De découvrir et exploiter des signaux faibles
  • D’engager ou renforcer un dialogue avec les parties prenantes
  • D’ajuster la stratégie de l’entreprise

Pour consulter vos parties prenantes, voici les étapes que Goodwill-management vous propose de suivre :

  • Etablir une liste exhaustive de toutes les personnes et entités concernées ou intéressées par les activités de votre entreprise.
  • Evaluer le caractère stratégique de chaque partie prenante en se posant deux questions : « Quel est l’impact de mon activité sur la partie prenante ? » et « Comment la partie prenante influence-t-elle l’organisation ? ». Les deux premières étapes peuvent se traduire en une cartographie des parties prenantes.
  • Relier chaque partie prenante aux enjeux ESG auxquels elle se rapporte 
  • Récolter des données en utilisant des canaux adaptés à chaque catégorie de parties prenantes (conférences, entretiens, données RH…), en respectant le RGPD
  • Expliciter aux parties prenantes les objectifs et enjeux de l’élaboration de la matérialité et la communication des résultats

Etape 3 : Utiliser la méthodologie de l’EFRAG pour évaluer la matérialité d’un enjeu

L’EFRAG a publié en janvier 2022 une méthodologie pour évaluer le degré de matérialité d’un enjeu, sous la forme d’une grille d’analyse. Toutefois, la Commission européenne devrait diffuser une publication spécifique sur la double matérialité durant l’été 2023.

Selon l’EFRAG, l’enjeu doit être analysé au regard de sa matérialité d’impact et financière contenant chacun plusieurs critères :

La matérialité d’impact évalue :

  • La qualité de l’impact : s’il est positif ou négatif
  • Le type d’effet : avéré ou potentiel
  • La gravité de l’impact, qui est calculée par 3 critères : l’importance (scale) de l’impact, la portée (scope : l’étendue de l’impact, sur les territoires et les populations), et la rémédiabilité [ER1] de l’impact
  • La probabilité d’occurrence

La matérialité financière se divise en 3 critères :

  • La qualité de l’enjeu : positif ou négatif
  • L’importance (scale)
  • La probabilité d’occurrence

A cela s’ajoute l’analyse, pour chaque enjeu, de ses impacts, risques et opportunités sur 3 horizons temporels :

  • Court terme (moins d’un an)
  • Moyen terme (entre 1 et 5 ans)
  • Long terme (supérieur à 5 ans)

A ce jour, l’entreprise peut utiliser un système de notation personnalisé (de 1 à 5 par exemple) pour mesurer l’intensité de l’importance, de l’étendue et de la possibilité de remédiation. Au-delà d’un certain seuil, l’enjeu est considéré comme matériel du point de vue de son impact. Le choix du seuil de matérialité devra être justifié.

Une fois cela fait, l’entreprise doit consolider ses résultats, c’est-à-dire vérifier que les données ont été pondérées selon le nombre de parties prenantes interrogées et selon la taille du groupe et de ses filiales (sur la base du chiffre d’affaires ou des Equivalent Temps plein (ETP)).

Etape 4 : Mettre en forme l’analyse de matérialité

L’EFRAG ne précise pas la forme que doit prendre l’analyse de double matérialité.

A ce jour, les formats sont libres. Ils peuvent prendre la forme d’un texte, d’illustrations graphiques, de tableaux détaillés, ou d’une matrice, qui est le format privilégié le cadre de la matérialité classique.

Matrice de matérialité de la RATP - Goodwill Management

Exemple de matrice de matérialité simple de RATP (réalisée par Goodwill)

Et après ?

Si l’analyse de double matérialité doit être obligatoirement réalisée dans le cadre de la CSRD, sa publication dans le rapport de durabilité est facultative.

La proposition de la Commission européenne publiée en juin 2023 renforce le rôle de la double matérialité, puisqu’elle déterminera sur quels indicateurs ESG l’entreprise devra communiquer dans son rapport de durabilité.

Chez Goodwill-management nous sommes convaincus que le rapport de durabilité représente une opportunité d’accélérer la transition durable des entreprises. Pour que cela devienne une réalité, tout commence par une analyse de double matérialité de qualité, à la fois sincère et exhaustive.

Pour réussir cet exercice et garantir la qualité de votre rapport de durabilité, nos experts vous accompagnent.

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