Damien Lebret
Chef de projet
Le numérique est source de pollution et d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Selon l’ADEME, il représente 2,5% du total de l’empreinte carbone de la France ¹. La production des terminaux représente le poste le plus polluant en raison de la phase d’extraction des métaux. Très énergivore, la production concentre environ 79% de l’empreinte carbone du numérique (Note de synthèse Ademe-Arcep), suivi des centres de données et des réseaux.
Selon un rapport du Sénat sur l’empreinte environnementale du numérique ², si nous ne faisons rien, les émissions de GES liées au numérique pourraient augmenter de 60% en 2040, ce qui représenterait 6,7% des émissions en France.
Afin de réduire l’empreinte environnementale du numérique, la France a promulgué la loi REEN le 15 novembre 2021.
Cette loi vise à renforcer la responsabilité de tous les acteurs du numérique face à leur impact : consommateurs, professionnels du secteur et acteurs publics.
En raison de l’impact considérable de la production des terminaux numériques, il est essentiel d’allonger leur durée de vie et de limiter leur renouvellement.
Pour cela, la loi REEN renforce la lutte contre l’obsolescence programmée, notamment logicielle. Celle-ci est liée à l’installation de mises à jour inadaptées rendant un produit obsolète. Ainsi, le consommateur sera désormais informé sur les caractéristiques des mises à jour et de leurs impacts sur ses appareils (baisse de performance, changement de fonctionnalité, stockage, etc.). De plus, ils devront être libres de pouvoir installer le système d’exploitation qu’ils souhaitent au bout de deux ans. Les fabricants, quant à eux, ne pourront plus bloquer la restauration des fonctionnalités des terminaux réparés et reconditionnées.
Par ailleurs, il ne sera également plus obligatoire de fournir des écouteurs lors de la vente d’un téléphone neuf. Les fabricants devront cependant être en mesure de fournir des écouteurs compatibles pendant l’intégralité de la commercialisation du produit.
Pour tendre vers une sobriété numérique sur les territoires, les collectivités territoriales sont aussi concernées par la loi REEN notamment par deux mesures principales.
Tout d’abord, les communes et leurs intercommunalités de plus de 50 000 habitants devront avoir conçu une stratégie numérique responsable. De plus, elles devront intégrer des enjeux de récupération de chaleur des datacenters dans les plans Climat Air Energie Territoriaux (PCAET).
Concernant la gestion des équipements numériques du secteur public, les équipements de 10 ans ou moins seront désormais orientés vers des filières du réemploi ou de réparation notamment via des dons gratuits auprès d’entreprises solidaires d’utilité sociale.
Autre avancée importante de la loi REEN, des indices de réparabilité (dès 2023) et de durabilité (dès 2026) seront intégrés dans les achats publics tel que défini par la loi AGEC.
L’un des enjeux majeurs de la loi REEN est de soulever une prise de conscience des impacts environnementaux du numérique par les utilisateurs.
Pour cela, des modules de numérique responsable et de sobriété numérique seront intégrés aux cursus des écoles ainsi que dans le supérieur à partir de la rentrée 2022.
En intégrant le numérique responsable, les formations déjà existantes prendront mieux en compte les impacts environnementaux.
De plus, les formations à destination des ingénieurs en informatique intégreront désormais des cours sur l’éco-conception des services numériques.
Par ailleurs, la loi REEN va permettre la création d’un observatoire des impacts environnementaux du numérique, sous la direction de l’ADEME et de l’ARCEP. Ses missions seront notamment d’analyser et de quantifier « les impacts directs et indirects du numérique sur l’environnement ainsi que la contribution apportée par le numérique, notamment l’intelligence artificielle, à la transition écologique et solidaire » et d’élaborer « une définition de la sobriété numérique »
La loi REEN vise également à développer et à faire émerger des usages de numérique écologiquement plus vertueux.
Pour cela, la création d’un référentiel général pour l’éco-conception des services sera mise en place, dont les critères seront détaillés à partir de 2024.
Par ailleurs, l’encadrement du démarchage téléphonique sera renforcé et l’utilisation par les démarcheurs de certains numéros sera interdite.
Le CSA va également publier une recommandation à destination des entreprises de services de VOD afin d’informer leurs utilisateurs des émissions de GES liées à l’utilisation de leurs services, en prenant en compte notamment, les modalités d’accès à la qualité de leur affichage.
En tant qu’acteur majeur du numérique, les datacenters sont également concernés par la loi REEN.
En effet, dès 2022, les conditions d’accès à la réduction tarifaire de la taxe intérieure de consommation finale d’électricité par les datacenters seront renforcées. Pour y être éligible, les datacenters devront transmettre différents indicateurs prouvant la mise en place d’actions visant à réduire leur empreinte environnementale.
Bien que cette loi permette plusieurs avancées conséquentes, certains manquements viennent nuancer le bilan de la loi REEN.
On peut tout d’abord regretter le rejet de la proposition initiale d’allongement de la garantie des appareils numériques de 2 ans actuellement à 5 ans. De plus, les fabricants n’ont toujours pas l’obligation de distinguer la mise à jour « de sécurité » et mise à jour « de confort », pouvant accélérer l’obsolescence de certains équipements.
Par ailleurs, les produits reconditionnés perdent également un avantage financier par rapport aux produits neufs, puisque la loi acte la suppression de l’exonération de la copie privée pour les produits reconditionnés, entrainant une augmentation de 10€ du prix de vente de ces derniers. De plus, ils ne bénéficieront pas d’une taxe verte, leur permettant de bénéficier d’une TVA avantageuse de 5,5%.
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