La Triple Comptabilité réinvente la manière de compter
Et si les entreprises affichaient des comptes équilibrés tout en détruisant, sans le savoir, les conditions mêmes de leur pérennité ? L’eau, le climat, la biodiversité mais aussi les compétences internes ou la cohésion sociale sont des actifs invisibles dans les bilans classiques. Pourtant, leur dégradation entraîne des risques majeurs. Intégrer ces risques dans la comptabilité ne relève pas seulement d’un impératif écologique ou social : c’est désormais un enjeu vital.
Aujourd’hui, la comptabilité d’entreprise ne mesure que les flux financiers. Les destructions de capital naturel (climat, eau, biodiversité) ou humain (santé au travail, compétences, cohésion sociale) restent invisibles dans les bilans, bien qu’elles conditionnent directement la pérennité des organisations.
La triple comptabilité propose de combler cette faille en traduisant ces impacts en équivalents monétaires. Concrètement, elle fonctionne comme une comptabilité classique, avec un compte de résultat et un bilan, enrichis de deux volets supplémentaires :
● La valeur sociale et sociétale créée ou détruite (précarité, inclusion, accidents du travail, etc.) ;
● La dette environnementale (émissions de GES, consommation des ressources, artificialisation des sols, etc.)
La méthode T3K – développée par Goodwill-management et intégrant la notion de quotas issus des limites planétaires – permet déjà de calculer une dette ou un excédent environnemental et social en parallèle du résultat financier. La Chaire de Triple Comptabilité vise à renforcer la robustesse scientifique de cette méthode.
Les travaux de recherche porteront notamment sur :
● l’amélioration de la méthode d’évaluation de l’impact d’une activité économique sur la biodiversité et les ressources ;
● l’exploration des liens entre thermodynamique et économie, pour repenser en profondeur la notion même de valeur ;
● la publication de résultats académiques et d’un ouvrage de référence.
Un électrochoc nécessaire pour les entreprises
La triple comptabilité ne se contente pas d’ajouter des indicateurs extra-financiers aux rapports de développement durable. Elle révèle de façon binaire si une entreprise crée réellement de la valeur ou si au contraire elle en détruit.
Construire des ponts entre le monde académique et les entreprises
La Chaire Triple Comptabilité a également une vocation de recherche (publications et communications scientifiques) et d’enseignement (formation initiale et continue). Elle a été pensée comme un laboratoire d’innovation comptable, avec la feuille de route suivante sur une durée de 3 ans :
● Année 1 : amélioration scientifique de la méthode et revue critique des modèles existants ;
● Année 2 : expérimentation de la méthode auprès d’entreprises volontaires ;
● Année 3 : approfondissement de la recherche fondamentale sur la notion de valeur.
Ce partenariat inédit associe des institutions académiques reconnues et des entreprises mécènes (Baker Tilly, Ekodev, ERB, Nexity) pour remettre la science au cœur des pratiques économiques en fournissant aux entreprises des outils accessibles et opérationnels qui s’appuient sur les meilleurs standards académiques.
La Chaire Triple Comptabilité s’inscrit également dans une dynamique internationale. Elle collabore notamment avec une chercheuse de l’Université de Lund, en lien direct avec le Stockholm Resilience Centre, à l’origine des travaux sur le concept de limites planétaires.
En créant un langage commun entre chercheurs et acteurs économiques, la Chaire Triple Comptabilité contribue à préparer l’application concrète du principe pollueur-payeur, qui s’imposera tôt ou tard comme un standard économique incontournable.